Un mois, un garage Citroën, par le CESCQUAL

Les magasins d'exposition

Au delà des garages destinés à réparer les automobiles, il y avait, dès les années 20 et 30 de véritables "show rooms" Citroën, précurseurs de notre actuel et controversé "DS World".

On les appelait des "magasins d'exposition", destinés à présenter les automobiles en plein centre ville, dans un écrin de luxe et de prestige.

Quatre d'entre eux ont survécu en France, et ils présentent des caractéristiques architecturales proches, ça ne doit pas être un hasard mais bel et bien une instruction de cohérence donnée par les services de la propagande.

Je vous les présente ci-dessous: Bordeaux, Nantes, Toulouse et le magasin de la place de l'Opera, à Paris.

 

Bordeaux

Cet immeuble très effilé est situé ici, dans les très prestigieuses "allées de Tourny": http://goo.gl/maps/ykLds

Voici l'intérieur, avec sa déco années 20, et ses carreaux noir et blanc typiques des garages Citroën des années 20/30.

Nb: je ne suis pas sûr à 100% que ces deux photos de ma collection soient bien celles du magasin de Bordeaux, ça pourrait être un autre, d'autres photos viendront sans doute un jour le confirmer ou l'infirmer.

 

Toulouse

Toulouse est un magasin qui a été beaucoup photographié, notamment du fait de son magnifique escalier intérieur.

La grande similitude de forme avec le bâtiment de Bordeaux ne vous échappera pas.

L'emplacement du bâtiment est à l'angle rue de la pomme/ bd d'Alsace Lorraine, ici exactement: http://goo.gl/maps/RfiK5

Et voici le fameux escalier.

On devine l'escalier depuis la rue, de jour comme de nuit, c'est tout simplement magnifique.

L'escalier a survécu dans le magasin de fringues actuel, mais tronqué, avec création d'un étage supplémentaire. L'ensemble est devenu calamiteux.

"O tempora! O mores" comme disait le vieux pirate dans Asterix.

 

Nantes

à Nantes, le magasin d'expo était place Graslin, angle rue Voltaire, ici: http://goo.gl/maps/kd3zZ

Et voici quelques photos d'époque.

à Nantes le dessin sol en carreaux noir et blancs s'écarte de la norme Citroën.

Paris (place de l'Opera)

Enfin, indépendamment des magasins de la place de l'Europe et de celui des Champs Elysées, qui sont des cas à part, il y avait à Paris le magasin d'expo de la place de l'Opera, dans un style très proche des trois provinciaux.

Nous sommes ici: http://goo.gl/maps/07b5t

 

L'avis du Docteur Danche

J'aimerais beaucoup savoir la date à laquelle tous ces magasins ont été abandonnés par Citroën; la seule chose dont je suis sûr, c'est que la DS a été présentée dans le magasin de l'Opera, qui a donc perduré longtemps! On lit parfois que ce site n'était pas du tout rentable. Mais le DS World est-il rentable?

L'avis d'Ivan

Ca doit pas être très pratique d'avoir un appartement dans l'immeuble de Bordeaux, faut marcher de profil !

Plaisanterie mise à part, je suis bluffé par la beauté de l'architecture, les vitrines et l'escalier monumental notamment. C'est pas du Nouvel...

 

L'avis de Jérome

Ah oui, c'est grandiose ! Ces images magnifiques témoignent surtout du changement radical en même pas cent ans, du rapport à l'automobile : engouement et rejet. En 1920, il y avait peu d'automobiles, elles étaient le symbole de la nouveauté, du progrès technique accessible, de nouvelles libertés et de nouveaux loisirs en perspective. Les magasins d'expositions automobiles occupaient donc naturellement des places de choix dans les centres des villes, et dans des architectures parfois spectaculaires ou prestigieuses. Cent ans plus tard, on prend des mesures, de plus en plus nombreuses, pour la rejeter hors de la ville. Elle est devenue nuisible et symbole de pollution. Les seuls temples prestigieux contemporains dédiés à l'automobile populaire sont des musées ! Les images parlent d'elles-même : aujourd'hui ce sont les banques et les magasins de fringues, la consommation et le jetable, qui suscitent l'engouement et occupent logiquement ces belles architectures en centre-ville. L'automobile telle que nous la connaissons appartient déjà presqu' au passé. Mais rien ne dit qu'elle ne reviendra pas un jour, sous une autre forme, occuper ces espaces !

 

L'avis de Volubilix

L'ambiance intérieure du magasin de l'Opera est assez bien rendue dans le film de Lelouch "Le bon et les méchants", sauf que de l'intérieur, on voit en arrière-plan une enseigne actuelle à travers l'une des vitrines de la Commerzbank : on ne peut pas penser à tout ! L'action se passe aux débuts de la Traction Avant. Jacques Dutronc vient au magasin (je ne sais plus si Jacques Villeret l'accompagne) et le vendeur est Philippe Léotard.
Dites-le, hein, si je suis hors sujet. *

 

L'avis de Régis (de la DRAC)

Encore une fois de plus, Danche vous nous gâtez!!!
Ces photos génèrent plusieurs remarques:
- Le choix des immeubles: deux immeubles "placard", souvent difficiles à utiliser, mais tellement forts aux niveau visibilité et urbanisme! Ce sont des immeubles de type Haussmannien, prestigieux, à haut rez-de-chaussée; les deux autres exemples sont très bien positionnés, et composés de deux façades d'angle. Le choix de l'immeuble et de son urbanisme était bien évidement un élément fondamental.
- Le type de menuiserie: les trois cas provinciaux présentent le même dessin de menuiserie: un grand volume central avec un mince encadrement en verre et petits bois; c'est d'un très grand raffinement, et tout est fait pour ne pas couper la vision sur les voitures; le choix de ces grandes surfaces vitrées, comme pour le magasin de Paris, est aussi technique et couteux. Citroën avait fait le même choix pour les vitrines du grand Garage Citroën de Lyon, avec des grandes ouvertures et un découpage en trois parties, mais la partie centrale représentant bien 3/5ème de la largeur, permettant ainsi une très grande visibilité.
Et à Nantes, la menuiserie nous est parvenue en grande partie! C'est extraordinaire!!! photos, les amis nantais!!!!
- Les espaces intérieurs sont entièrement dédiés au temple de la voiture; peu de mobilier, parfois une légère estrade. Les luminaires sont soignés aussi.
- Enfin les sols: le traditionnel carrelage blanc et noir (nous en reparlerons à un prochain épisode) est omniprésent, sauf pour le magasin de Paris, en marbre visiblement! L'effet carrelage de château 18ème est sûrement une directive du cahier des charges de ces magasins? Si quelqu'un trouve un jour ce cahier des charges, ou cette charte de magasin comme on dit aujourd'hui, le Docteur sera preneur, c'est sûr!!!! Vous aurez droit à un abonnement d'un an au DanchoJournal!

Ces magasins témoignent de la place particulière que tenait l'automobile dans la société à cette époque: luxe, technique, beauté...
Alors notre DSworld!? Et bien je le trouve super dans son époque: la devanture se veut technique et luxueuse, mais l'époque blingbling ne nous échappe pas dès que l'on rentre à l'intérieur: voitures certes très technologiques, mais à la beauté surfaite et très mode, pacotille plus que luxe... Ce nouveau magasin est vraiment dans l'esprit de ses aïeuls, mais nous renvoie à la triste réalité de notre société et de ses travers.... l'automobile nous ressemble!

 

* ouaip t'es hors sujet. Danche.